I. NOM ET PRENOM.
II. LES DESCRIPTIONS.
La première chose que l'on remarque chez Chester, autre son sourire ou son abondante chevelure, c'est son regard. De beaux yeux étirés et soulignés de trois grains noirs au côté droit, débordant d'une malice qui le caractérise si bien et qui, pour peu que ses paupières se plissent, sont semblables à deux traits bleus argentés protégés sous une légère protubérance transparente (c'est du moins l'impression que leurs lueurs renvoient), rendant sa focale plus profonde encore.
Tout comme ses iris qui se rétrécissent ou se gonflent presque selon son état, son nez au cartilage estompé et aux narines bien dessinées, fait aussi penser à celui d'un félin. Ses lèvres sont fines et semblent n'avoir aucune limite lorsqu'elles s'étirent en travers son visage, les coins pointus comme s'ils étaient aiguisés, et une dentition aux petites dents parfaitement blanches et alignées. Un point termine son joli minois entre son menton et la commissure gauche de sa bouche.
Du haut de son mètre soixante-neuf, sa souplesse non plus n'a rien à envier à celle du chat à qui il possède également les oreilles légèrement pointues, une déformation cachée sous une épaisse et longue chevelure bouclée et flamboyante avec laquelle il fait une lourde tresse parfois.
Son extravagance ne s'arrête pas là.
Des teintes exécrables s'unissent via des couches et des couches de tissus légers avec lesquelles il couvre sa carrure finement sculptée, parfois mise en valeur s'il porte une tenue serrée ou s'il laisse entrevoir un peu de sa peau claire. Vous l'aurez compris, Chester porte ce qui lui tombe sous la patte même si à la base il choisit toujours ses vêtements avec un certain raffinement. L'idéal pour qu'il ait l'air de bien les porter, serait certainement de trouver de la cohérence entre ces tissus, reflétant là le désordre de son esprit tourmenté.
III. L'HISTOIRE.
Tout commence par l'histoire d'une jeune fille qui se perd dans un monde merveilleux. Mais qui ne la connaît pas, alors qu'il s'agit probablement de l’œuvre la plus célèbre d'un certain Lewis Carroll ? Un chat au large sourire se mêle à l'aventure afin d'aider de sa folie Alice, la protagoniste. C'est un Cheshire cat. Un chat qui peut sourire. Perché sur son arbre, agaçant et taquin, il apporte sa touche philosophique, sous les airs d'un animal à l'allure démente. Sans réellement y participer, il fait pourtant partie intégrante du conte, dont l'univers se trouve également sous l'ordre d'une reine tyrannique et où chaque personnage possède tant de diversité.
Et si ce chat avait pour particularité de disparaître en ne laissant pour trace que son célèbre sourire ou les traits de ses rayures, une fois réincarné il n'a malheureusement pas su garder cette incroyable capacité. Né dans une famille bourgeoise, dont le père avait trouvé richesse dans le textile, Chester S. Winks resta fils unique. Dans tous les sens du terme d'ailleurs, le bébé avec sa crinière épaisse et ses grands yeux de chaton attirait l'attention et était garni comme le plus beau des poupons. Il fut gâté à excès. Adorable, il n'en restait pas moins timide et silencieux, rejeté des autres enfants alors qu'il préférait aller s'instruire plutôt qu'aller se mêler à eux. En effet, c'est auprès des adultes qu'il trouvait sa place, ceux-ci plus facilement attendri et aimant, notamment face à ses extravagances. Ainsi, le garçon resta davantage chez lui, sous la protection de sa mère et enfermé dans ce cocon que formait la petite famille.
Un drame changea la donne, un jour où il avait seulement 7 ans. Pris d'assaut par des cambrioleurs en pleine nuit, car même s'ils possédaient des biens précieux ils n’en étaient pas au point d'être placé dans le quartier le plus sécurisé, ses parents le rendirent orphelin. Sa mère, en voulant fuir une altercation qui tournait mal, y laissa sa vie. Tandis que son père, fou de rage, fut à son tour tué pendant que son fils était resté à l'étage caché sous son lit. Le lendemain, on retrouva les corps et la maison pillée, puis le petit qu'on plaça à l’orphelinat. Dès lors, on comprit (ou remarqua seulement) que le petit Winks basculait dans la folie.
Les adultes ne comprenaient pas pourquoi il continuait à sourire ou rire après un tel événement, et ils se sentaient parfois effrayés par ce comportement. Abandonné, Chester apprit à vivre avec ceux de la rue presque avec aisance, rapidement pris en charge par un adolescent du bâtiment, convaincu que cet arrivant était plus malin que les autres. Ce nouveau venu était, il est vrai, aussi discret qu'un félin, aussi observateur et presque aussi insensible qu'un prédateur, pour un petit riche c'était étonnant et intéressant.
Dieu merci, cette période ne dura pas longtemps. Après quelques semaines, des amis à titre noble de ses parents vinrent le chercher et devinrent ses tuteurs. Sans réellement porter d'amour à son égard, ils l'offrir pratiquement à leur fils chéri et pourri gâté, afin de l'occuper, faisant naître une incroyable amitié.
Duquesme Dushime Dusan of the Chess, mais Duchesse était le surnom de cet autre garçon, comme quoi même dans ce monde, les destins sont voués à se croiser. Et puisque leur origine les unissait déjà, il fut naturel pour eux de trouver chez l'un l'autre la place qu'ils occupaient dans leur vie antérieure. Ainsi, le fait que le rouquin se prenne pour le chat de son frère de cœur dépassa le stade du jeu d'enfant. Il fut en effet normal pour eux de grandir avec cette espèce de lien et d'attachement à l'image de deux êtres dépendants l'un à l'autre, dont l'un possède cependant une responsabilité sur l'autre.
Du reste, contrairement à son ami, Chester grandit avec la liberté de faire ses propres choix. Sans le voir d'un bon œil non plus, ses tuteurs le laissèrent choisir son parcours, bien que le conflit s'engageait souvent quand ils craignaient l'influence qu'il pouvait avoir sur leur progéniture. C'est en faisant profil bas que le plus jeune continua ses aventures en toute discrétion, ne se confiant qu'à son meilleur ami et faisant comme s'il n'était qu'un fantôme auprès du reste de la famille. Bien sûr, il n'avait pas à se plaindre. Il était respecté, timidement aimé et avait retrouvé sa place dans le milieu aisé où il était né.
Son adolescence fut banale. Un garçon à la fois populaire et solitaire à l'école, bien plus apprécié et intégré que durant sa petite enfance. Dans le secret, il commença à se perdre au marché noir pour acheter ou vendre, ce qu'il continue encore aujourd'hui.
Il eut ensuite la chance de pouvoir continuer de grandes études en littérature, pendant que Duquesme se mariait. La présence de Rose, sa femme, ne l'empêcha pas de continuer à traîner dans les pattes de ce dernier, même s'il passait le plus clair son temps à jouer la carte de la taquinerie et de l'hypocrisie avec la dame, plutôt qu'à l'apprécier.
Lorsqu'il eut vingt et un an, Duquesme lui fit pour magnifique cadeau un palace entier afin de faire de lui son collaborateur. Et puis, porteur d'un titre noble, le blond n'avait de toute manière pas d’intérêt à reprendre le bâtiment (cela aurait été mal vu), aussi il fut plus simple pour lui de laisser son meilleur ami donner son nom au projet.
Malgré la jalousie de l'épouse, les doutes des parents et son diplôme fraîchement acquis dont l'apprentissage n'y était pas lié, le chafouin accepta et se mit à le gérer grandement. Avec son caractère particulier, il imprégna les murs d'une originalité qui ne manqua pas de séduire la Haute société. Et avec les richesses de sa famille d'adoption, il ajouta la touche prétentieuse et sans limites qui acheva de garder la clientèle huppée des anciens propriétaires. L'argent appelle l'argent, n'est-ce pas ?
Quelques années plus tard, ses parents adoptifs décédèrent et son entourage changea du tout au tout. Éloigné émotionnellement de tous ces événements grâce ou à cause du choc installé depuis ses sept ans, Winks continua ses affaires avec toujours ce manque de réaction étrange quant au décès soudain du duc et de la marquise. N'ayant nullement l'air affaibli par les tragédies qui l'entouraient, surtout que son rôle était désormais de soutenir son ami, Chester continua ses rencontres et ses petites aventures comme si rien ne le touchait. Dans sa folie et son détachement de toute logique, son homosexualité n'a jamais été quelque chose de tabou pour lui, même s'il joue la carte du séducteur de ces dames pour garder une image propre et s'éloigner de toutes rumeurs.
IV. DERRIÈRE L'ECRAN.