Au fil du temps, Heather n’a jamais réellement perdu les traits de caractère avec lesquels elle a été socialisée. Observatrice, silencieuse, elle fait valoir très peu d’opinions à voix haute, parce qu’elle a la vivacité d’esprit nécessaire pour savoir à l’avance quand personne n’écoute. Néanmoins, lorsqu'elle décide finalement à sortir ses quatres vérités à qui que ce soit, elle n'y va pas de main morte. Miss Cloverfield est très perceptive et son éducation lui a appris à savoir ce que les gens veulent avant qu’ils ne le veulent et à agir en conséquence pour leur faire plaisir. Cette personnalité fait d’elle quelqu’un de très à l’aise lorsque vient le temps de conclure des négociations, ou d’être une bonne hôtesse pour l’auberge, cela lui donne un certain charme qui plaît au public, cependant, peu de gens savent réellement ce qui se passe dans sa tête, quelles caractéristiques la composent réellement.

En grattant un peu cette couche de vernis social, on y trouve une personne qui veut réellement faire plaisir, pas parce qu’elle y est obligée, mais parce que c’est quelque chose qui la rend heureuse. Curieuse de nature, Heather est une personne qui aime accumuler le savoir. Pas pour pouvoir se vanter avec après, non non, juste, le savoir est pour elle un trésor qu’il faut entretenir. La finesse de l’esprit est quelque chose qui se travaille et ainsi, il faut continuer de le nourrir, lui apporter de nouvelles connaissances. Enfant, l’école lui apprit que les personnes intelligentes ont plus de succès dans la vie que les brutes épaisses. Celles qui calculent, celles qui ont un plan, celles qui ont une direction, les ambitieuses, se retrouvent toujours en tête de file. Ainsi, donc, elle décida de vouer sa vie à la recherche et au dépassement de soi.

Heather Temperance a cependant de terribles vices. Le premier va complètement à l’encontre du nom qui lui a été transmis par feu Madame Cloverfield. En effet, The Sparrow est terriblement rancunière, sachez-le avant de songer à lui faire du mal. Tellement rancunière que si elle vous y prend, sa vengeance pourrait être une centaine de fois plus terrible que la gravité de votre faute. Elle réagit de façon violente au crime contre elle où les personnes qui lui sont proches, un peu à la manière d’une mère ours qui chercherait à défendre ses petits. Il est effrayant de la voir passer du tout au tout, de la douceur et de la gentillesse à la colère concentrée. Lorsque son sourire bienveillant s’efface et laisse place à un silence et un regard de mort, il vaut mieux pour vous de vous éloigner et de quitter son entourage le plus rapidement possible.

Son deuxième vice, un qui étonnamment se gère mieux que le premier : l’alcool. Dès qu’elle eu le tempérament assez fougueux pour commencer à échafauder des plans, son objectif principal a toujours été le même : trouver un moyen d’obtenir l’accès au cabinet à alcools forts de son paternel. Celui-là même gardé d’un œil vigilant par Monsieur Cloverfield qui n’autorisait personne d’autre que lui à y plonger la main pour en sortir une bouteille. Jalouse des moments qu’il passait avec Leslie et Carlisle à déguster des whiskys qui dataient d’une autre époque, cela a toujours été une envie irrésistible pour Heather de pouvoir elle aussi sentir sur sa langue la brûlure de l’alcool fort. Dire qu’elle obsède serait faire l’usage d’un euphémisme terriblement déplacé.

Heather Temperance possède néanmoins d’autres qualités, et d’autres défauts aussi. Notamment une rigueur et un perfectionnisme sans pareil, un amour du travail bien fait. De plus, elle s’intéresse sans malice aux gens et à leur façon d’exister, de vivre. Ses clients et ceux qui la connaissent de manière plus intime savent qu’elle est toujours heureuse de voir des gens passer le pas de la porte de l’Oiseau d’Or, et qu’elle ne boit pas leur parole simplement par politesse. Il s’agit également d’une personne fiable, qui sera toujours honorée que l’on place sa confiance en elle. Évidemment, elle n’effectuera que très peu de gestes désintéressés et si on lui demande une faveur, elle demandera à ce que les comptes soient rendus. Néanmoins, elle ne fait rien à moitié et généralement, c’est quelque chose que l’on appréciera beaucoup chez elle.

Heather Temperance est une femme de taille un peu au dessus de la moyenne de l’époque. 1M60, ni plus ni moins. Sa silhouette est allongée et svelte, avec une poitrine se faisant très discrète à travers un poitrail et des épaules larges. Au naturel, elle se tient toujours bien droite, le dos légèrement arqué vers l’arrière, ce qui lui donne une silhouette très angulaire. Elle possède une carrure délicate, mais personne ne doutera jamais de sa force physique en la voyant soulever à elle seule une caisse pleine à craquer de bouteilles pleines, surtout en voyant se dessiner la ligne des muscles de ses bras, de son cou et des muscles proches de omoplates.

Mademoiselle Cloverfield a des mains aux longs doigts faites pour le travail de précision. Elle garde ses ongles coupés court pour éviter de les abîmer lors du travail manuel fait à l’auberge. Souvent, elle se coupe et se blesse aux mains, mais à force de l’habitude, ce sont des blessures mineures qui ne la gênent plus du tout dans son travail. Ce sont des mains volubiles, agiles qui restent très peu immobiles et qui bougent beaucoup lorsqu’elle est nerveuse et même lorsqu’elle parle. Reste que la peau de ses mains est anormalement douce et agréable, car elle en prend bien soin. Ses mains sont son outil de travail, vaut mieux en prendre soin.

Heather a une chevelure blonde cendrée, coupée courte après les funérailles de Monsieur Spencer, symbole d’un changement drastique de son statut social. Beaucoup d’habitués de l’Oiseau d’Or se rappelleront de ses longs cheveux qui, détachés lui arrivaient facilement dans le creux des reins, et se désoleront de voir qu’ils ne lui arrivent même pas au creux du cou. Cependant, beaucoup admireront son courage d’oser la coupe courte et seront attirés par la fougue de ses cheveux lorsque le vent décide de jouer avec. C’est peu commun chez les femmes de l’époque, et elle nouera souvent une toute petite tresse dedans lorsqu’elle travaille pour se garder un peu de contenance et éclairer son visage.

Parlant de visage, The Sparrow a des traits aussi fins que son esprit, un petit visage au menton pointu, un nez de taille moyenne effrontément fouineur et légèrement retroussé, une peau qui dore très difficilement au soleil et des yeux sombres et scrutateurs, cernés comme ceux de quelqu’un qui travaille parfois (souvent) jusqu’aux petites heures du matin. Trait intéressant, elle a des sourcils plutôt épais, un peu plus sombres que sa chevelure, et n’a pas le besoin n’y l’envie d’y accorder beaucoup d’entretien, ce qui lui donne un regard vif et sévère.

Pour ce qui est de ses vêtements, elle s’habille à la mode de l’époque, mais rappelons qu’elle fait partie d’une classe de bourgeoisie d’affaire qui n’a pas l’argent ni l’intérêt à avoir des frivolités sur ses vêtements. Ses jupons seront ainsi très simples, ses manches courtes et son cou souvent à découvert pour lui éviter une mort certaine lors de ses longues journées de travail à l’auberge. Elle possède néanmoins quelques habits chics qu’elle garde pour les occasions spéciales ou lorsque l’envie de se bichonner se fait trop forte. Elle ne possède que trois paires de chaussures, des bottillons plus légers noirs marqués par des mois de marche sur les pavés, gorgés de bière renversée et au bout égratigné par le temps et l’usure, des bottes rembourrées pour les marches à l’extérieur par temps pluvieux, et une paire de souliers de toile qu’elle n’a porté qu’à une ou deux reprises, l’une étant, si elle se souvient bien, son mariage. Son statut de veuve est trop récent pour qu’elle ne se soit décider à retirer son anneau de mariage, et celui-ci lui rappelle inlassablement sa quête personnelle, elle ne voit donc pas l’intérêt de le retirer, ce qui lui vaut souvent des questions de la part de la clientèle.

Il en est ici d’une histoire dont les commères pourront se nourrir durant des années.
Un gâchis, une femme gaspillée, rendue obsolète par la mort violente d’un mari au futur si brillant, si prometteur.

Quelle ironie, dans une situation pareille, de porter le nom « Tempérance ».

Toute histoire a un début, il est juste de le prendre pour acquis.
Notre histoire commence ici en banlieue londonienne, sur une terre prospère, dans une famille modeste au mode de vie mondain, mais qui avait le luxe de pouvoir se retirer en campagne lorsque Londres devenait trop hmmm, comment dire, agitée? Trop odorante, trop populeuse...Quand la ville devenait trop ville pour ce que l’on pouvait supporter.

On étant bien sûr Monsieur Emmanuel Cloverfield, un homme d’affaires dont l’évocation du nom faisait sonner quelques cloches. Pardon? Cela ne vous dit toujours rien? Cloverfield, forgeron, installateur, réparateur de cloches d’églises? Diantre, mais avez-vous vécu sous terre tout le siècle dernier? Hmpph. Enfin, passons.

Monsieur Cloverfield est père de trois enfants, deux hommes vaillants répondant respectivement aux doux noms de Leslie et Carlisle ainsi qu’une femme, Heather Temperance, dont le second nom lui fut donné en l’honneur de leur défunte mère emportée par la maladie.

Enfant, Heather et ses frères passent aux mains de plusieurs nounous – dont elle se souviendra d’ailleurs de tous les noms, mais Leslie et Claude sont rapidement appelés à contribuer à l’économie familiale. La forge Cloverfield changera alors de nom pour Cloverfield & Fils et jamais le nom de Heather ne sera mentionné nulle part. Parce que le métier de forgeron n’est pas fait pour les femmes, tout simplement. Plus ou moins une petite perte considérant qu’alors que ses frères n’auraient comme accès à l’éducation qu’un père aux valeurs archaïques faisant sa fortune sur la pérennité de la religion catholique, la cadette aurait droit à un traitement de choix : elle irait étudier à l’école, rien de moins.

Heather Temperance grandit parmi une cordée de petite filles sages. C’est une brave petite, Emmanuel Cloverfield a de quoi être fier. Lorsque Monsieur apprend le tempérament vindicatif de sa fille, il ne cherche même pas à l’atténuer et au contraire, l’encourage : dans la vie, il ne faut pas se laisser marcher sur les pieds. Œil pour œil, dent pour dent, ma chérie. Oui, papa. La jeune fille devient alors une femme  pleine d’ambition, mais qui nourrit également beaucoup de colère. Elle se souvient de toutes les dettes, de tous les maux, de tous les torts qu’on a pu lui causer, et c’est ce qui je crois mènera le plus vraisemblablement au point de bascule de son équilibre précaire.

Toute bonne histoire doit faire face à un élément déclencheur, tenons-nous le pour dit.
Vient un moment dans la vie d’une jeune femme où il faut la marier. Non seulement parce qu’il s’agit d’une bouche de trop à nourrir, mais que sa dot peut couvrir certaines dépenses, légitimes ou non. Disons que certains choix de vie de Monsieur Cloverfield ont justifié son désir de marier Heather au plus vite, mais pas avec n’importe quel idiot. Des plans pour qu’il la divorce et qu’elle revienne. Non, non, non, hors de question. Si elle part, elle part pour de bon. S’enchaînent alors les réceptions, les fêtes et les bals avec une seule et unique quête : trouver un homme qui arrivera à dompter cette jeune femme à l’esprit trop aiguisé et au caractère trop pointu pour le bien de la famille.

Entre du côté jardin Luke Wade Spencer, un jeune homme ô combien charmant, bienveillant, doux, mais surtout RICHE. Voyez, les mariages pour l’argent ne se faisaient pas qu’entre aristocrates et une union pareille rapporterait non seulement une somme intéressante aux Cloverfield, mais pouvait signifier le début d’un partenariat économique intéressant entre la famille Cloverfield et la famille Spencer. Ce mariage était donc extrêmement bien vu de la part des deux autorités familiales.

Dans le temps de le dire, on commence à s’adresser à Heather comme Mademoiselle Spencer. Les nouveaux mariés, on ne peut plus conscients de leur mariage arrangé, décident alors t’en tirer le plus possible. Ils quittent le nid familial et mettent la main sur un bâtiment à vendre à Londres. En attendant que l’amour naisse dans leur union, ils pourraient au moins collaborer ensemble sur un projet d’affaire. Ils avaient d’ailleurs les profils parfaits pour. Heather avait un intérêt marqué pour l’alcool et savait tenir un budget de façon rigoureuse. Luke quant à lui, avait un sourire à faire fondre et le charisme nécessaire pour jongler avec le bien-être de plusieurs individus à la fois.

La logique voulait qu’ils ouvrent une auberge. Bien évidemment, ils suivent la logique et ouvrent l’Oiseau d’Or, un établissement confortable pour voyageurs aisés, où il fait bon de venir se reposer ou ne serait-ce que prendre un verre. Ils trouvent dans cette entreprise un succès relatif, mais c’est suffisant pour convenir à leur mode de vie.

La relation d’Heather et de Luke prend quatre années à se développer, à se forger en un amour rempli de compassion et de compréhension plus que d’érotisme. Voyez, Heather est de celles qui ne ressent pas d’attirance sexuelle pour qui que ce soit sauf dans des circonstances bien particulières, et Luke, bien que complètement étranger à cet état, préférait de loin voir sa femme s’épanouir dans sa vie professionnelle et dans leur affection mutuelle plutôt que dans une relation basée sur son pouvoir sexuel. Ce sont des opinions qu’il garde pour lui, mais elles font tout de même partie de leur propre accord matrimonial. Ils nourrissent alors une relation purement romantique qui leur donne la réputation du petit couple parfait de l’Oiseau d’Or.

C’est à ce stade-ci que les choses se corsent. Vous connaissez certainement l’adage qui dit que toute pierre précieuse a plusieurs facettes, certaines plus claires que d’autres. Heather n’échapppe évidemment pas à la règle. Ses recherches poussées sur l’alcool la mettent en contact avec des « ressources » magiques. De l’herboristerie, principalement. Le désir de se dépasser et celui de créer des alcools au goût qui fidéliseront et plairont à sa clientèle la poussent à aller chercher des ingrédients auprès de sorciers plus ou moins anonymes. C’est très illégal, et elle ignore le moment précis où la curiosité l’a emporté sur la raison, mais maintenant qu’elle a les deux pieds dedans, elle ne peux plus retourner en arrière.

Un jour, alors qu’elle rentre un peu tard et un peu éméchée d’une escapade dans un établissement voisin, question d’entretenir les bonnes relations entre les brasseurs locaux et l’Oiseau d’Or, si vous voyez ce que je veux dire, Heather Temperance fait une découverte scandaleuse. La vitrine avant de son logis et son gagne-pain est fracassée et la porte défoncée claque au rythme du vent qui s’engouffre à l’intérieur. Heather entre. L’Oiseau d’Or est dans un foutoir pas possible. Elle appelle Luke et sa voix se perd dans le silence de mort qui plane sur l’endroit. Elle continue à avancer pour ne découvrir que plus de grabuge. Dans le salon, les coussins et des fauteuils sont éventrés, vidés de leur bourre. La taverne et la cuisine sont dans un état tout aussi pitoyable : vaisselle cassée partout sur le sol, bouteilles éclatées par terre, tonneaux percés, et j’en passe. Spencer appelle son mari à nouveau. Toujours pas de réponse. Derrière une table renversée, elle aperçoit une longue traînée rougeâtre jusqu’à lune fenêtre brisée qui la fige sur place : du sang.

Quelque chose se brise en elle. Heather refuse de se l’admettre, et elle refusera de rapporter l’incident aux autorités de peur que celles-ci fassent une investigation poussée dans son établissement et découvrent qu’elle flirte avec la magie, mais elle croit fermement que cette addiction nouvelle a à voir avec le ravage de son établissement et la disparition de son mari. Pour éviter que les indésirables mettent le nez dans cette histoire, elle invente la mort de son aimé, tient des fausses funérailles, entretient une urne pleine de cendres d’un animal quelconque sur le manteau de la cheminée, mais une flamme nouvelle naît au creux de son cœur. Ces bâtards ont choisi de chercher des poux à la mauvaise personne. Elle en devient obsédée. Son objectif est clair : retrouver Luke, vivant ou mort. Faire payer les responsables du ravage de l’Oiseau d’Or. Leur arracher le visage avec ses dents si nécessaire. Les faire regretter à jamais de s’être frottés à Heather Temperance Cloverfield.

THE SPARROW

Le moineau est un personnage du conte Le Chien et le Moineau des Frères Grimm. Il raconte l’histoire d’un moineau qui se lie d’amitié avec un chien qui décide à un moment de faire une sieste sur la route et se fait écraser par le conducteur d’une charrette qui refuse délibérément de changer sa trajectoire malgré les supplications de l’oiseau. Le Chien meurt, et le Moineau se lance dans une vendetta sans précédent contre le conducteur, perçant ses tonneaux de vin, éborgnant ses chevaux et mangeant ses récoltes. Le conducteur finit par l’attraper et décide de l’avaler tout rond plutôt que de le tuer sur le champ. Le Moineau se sert de son bec pour ronger le fermier de l’intérieur, et celui-ci tend sa hache à sa femme en lui donnant pour instruction de tuer le Moineau vivant dans sa bouche. La femme rate son coup et finit par tuer le conducteur, libérant ainsi l’oiseau toujours en vie qui s’envole, satisfait d’avoir exécuté sa vengeance.